Je me jette à corps perdu dans une cause qui ne
Je me jette à corps perdu dans une cause qui ne me touche même pas au fond. Bien trop besoin de croire encore en quelque chose, sans pour autant avoir d'espoir. Je me sentirais presque utile quand je rédige un tract pour le lycée hotelier, tract que je ne verrais surement jamais, quand je remotive ce lycée sous pretexte que moi je viens de celui qui. On est un peu l'élite des blocus de la ville. Et ça me fait rire parce qu'on met seulement des barrieres et des branchages devant les portails. Apres on s'assoit, on boit, on fume, on joue, on dort, on parle. Ouais c'est un peu ça. La grève est reconduite jusqu'au 25. Moi je suis déjà fatiguée. Peut etre parce qu'hier jusqu'à deux heures j'ai répété que je tournais en rond. Et putain j'ai completement oublié de rappeler Léo. Et puis ce matin, j'arretais pas de pleurer, sans arret, entre mon lit et l'ordi entre son silence et ses mots entre ma télé et Vellocet. Eux, je les aime vachement beaucoup quand même. Mais quand on m'appelle alors que j'ai oublié d'aller au lycée le matin pour mieux pleurer, quand on m'appelle pour aider un lycée qui pense que bloquer ça veut dire mettre du PQ dans les arbres, ben je me sens concernée, ben je me sens utile, ben je ne me sens plus moi. Et je voudrais devenir une syndicaliste qui écrit des tracts percutants. Ca serait presque chouette comme vie. Mais le soir quand je reviens, je voudrais seulement tomber le masque, de celle qui parle bien et intelligiblement et bafouiller que, ça va pas du tout, je suis entrain de crever, alors tant qu'à faire mourir au combat. Alors le soir quand je me retrouve seule face à moi, quand le téléphone ne sonne ni de tarbes, ni de paris, que je n'arrive plus à dormir, en cachette je me mets gravement à fumer. Juste parce que sinon je dormirais seulement trois heures par nuit. Demain, la premiere au front ça sera moi, comme ce soir, avec C et V on été les derniers à tout preparer. Heureusement qu'elle m'a bien faite rigoler. De l'autre côté de la grille, son regard triste qui me bouleversait et nos rires qui s'écrasent dans cette prison de fer.
Quitte à crever, autant crever de contestation, de rage et d'engagement que de passion et d'amour. Mais ses mots rouges, comme le sang qui de plus en plus s'écoule.